samedi 8 octobre 2011

Le scandaleux business de la louange ? Debat contradictoire

par actualitechretienne
La louange est-elle en passe de devenir un scandaleux business florissant ? De nombreux directeurs de louange sombrent-ils dans l’auto-adoration ?
Le pasteur Samuel Foucart le croit et monte au créneau face à cette nouvelle génération d’églises « musicales » ! Bien qu’il partage certaines de ses observations, Paul Ohlott possède un avis divergent sur le sujet et appelle à un profond changement des mentalités !
Actu-Chretienne.Net vous propose de participer à ce débat…

La louange est un business désormais ! Et même un business florissant à en croire certains ! Sans doute qu’écrire ce genre de choses va choquer, déplaire, déranger, mais  je suis convaincu qu’il est important d’en parler. Peut-être me direz-vous :  «Mais de quel droit ?» Ou bien encore : «Quelle est votre légitimité pour parler ainsi ?». Alors, pour éviter de passer trop de temps à répondre à ces questions, je le fais de suite. J’ai travaillé dix ans de ma vie en tant que pasteur- organisateur de tournées en France et en Europe. J’ai ainsi travaillé à préparer plus de 500 concerts dits «de louange».
Au sein de ce petit monde-là, on trouve une multitude de gens dont les motivations ne sont pas toujours aussi claires qu’on pourrait l’espérer ou le souhaiter, loin s’en faut ! Sur une tournée par exemple, il y a l’artiste, certes, mais aussi les musiciens qui l’accompagnent, les choristes, les techniciens et puis toute la partie logistique et c’est souvent dans tout cet entourage que le bât blesse. Si j’ai eu la chance de travailler avec des gens sérieux, il m’est aussi arrivé d’en croiser de bien moins consciencieux !
Oui, quelques-uns sont juste là pour se faire plaisir ! Oui, certains sont profondément ennuyés à l’idée que vous ouvriez la Bible dans un concert chrétien, tout simplement parce que seule la partie musicale les intéresse ! C’est la triste vérité de constater qu’à tous les niveaux, artiste de renommée internationale ou entourage parfois très proche – et je ne parle même pas des auditoires que nous avons habitués à n’aimer que la musique – un trop grand nombre reste  dans la théorie en ce qui concerne la piété personnelle et l’adoration qui revient à Dieu.  L’adoption de postures propres à ces adorateurs d’un nouveau genre – yeux fermés, mains levées, airs contrits et pénétrés d’une gravité trop souvent surfaite  -  vient encore un peu plus troubler le jeu. On ne sait plus reconnaître le vrai du faux, du moins vue d’en bas ! C’est dans la pratique de la vie courante que se vérifiera l’authenticité ou non de leur adoration, et là, attention ! Déceptions en vue !
Dans un concert, il n’est pas rare aujourd’hui de devoir demander aux musiciens et artistes de manifester plus de sérieux au moment de la prédication – quand elle a encore  droit de cité – et même parfois, de bien vouloir rester avec le «petit peuple» pour  écouter le message annoncé. Sinon, et ce n’est pas si rare, ils sortent pour se retrouver entre eux et ne reviennent que pour terminer leur show ! La moindre des choses, venant de croyants consacrés à la louange serait d’entendre leurs voix se mêler à celle de l’Eglise. Mais non, ils font leur job et puis s’en vont !
Oui, c’est vrai que toutes ces postures extérieures citées plus haut peuvent donner l’impression aux autres qu’on est un adorateur. Tout ceci trompe souvent l’auditoire. Il est aussi juste  de constater  qu’il convient de soigner ses attitudes, de les entretenir et de les favoriser pour pouvoir vendre son CD  ! Mais le cœur n’est parfois que si peu concerné !
J’ai aussi vu, en dix ans de travail sur le terrain, la nouvelle génération des «leaders de louange» – déjà l’expression peut faire peur – arriver !  Et là, c’est encore autre chose ! La « peopolisation », est la norme, tout est organisé pour ! Tenue vestimentaire, discours limite arrogant de gamins qui croient  tout savoir  pour être passés dans telle ou telle école biblique formant à la louange – concept surréaliste s’il en est -  vidéos promotionnelles laissant croire que l’artiste, inconnu jusque là, évolue devant une salle bondée, alors que l’auditoire se compose de quelques dizaines de personnes !
Faut-il parler du nombre important – et même à en croire certaines statistiques, très important, puisqu’on va jusqu’à évoquer le chiffre de 80% – de divorces constatés chez les artistes chrétiens en francophonie ! C’est vrai que le divorce est hélas, une mode dont on se passerait bien, mais la proportion est dans ce domaine, ni plus ni moins énorme !
Je dois vous avouer ma lassitude de voir toutes ces jeunes filles ayant une jolie voix – car c’est parfois le cas, mais pas toujours – se sentir obligées de « faire leur CD » , mais à quel prix ? Et que penser de tous ces   jeunes gens de nos Eglises, qui, après s’être sévèrement endettés, partent  presque tous vers le Canada,  talent en bandoulière pour ensuite revenir en France faire « carrière » ! Le retour à la réalité est souvent cruel ! Personne ne leur a donc dit qu’ils pouvaient être simplement très utiles dans leur Eglise locale ? Et que la bonne formation était d’abord dans leur chambre, dans une authentique vie de piété, ainsi que Jésus l’enseigne ? C’est si triste de voir des Eglises perdre leurs jeunes, recrutés par des « Eglises » exclusivement musicales. Pas de prière, pas de louange personnelle donc, un comble, et pas de prédication, ou alors le strict minimum pour ne pas embêter le monde et se donner bonne conscience, mais de la musique de qualité – enfin là, c’est discutable – et des chants répétitifs à n’en plus finir !
Juste un mot sur le contenu de ces chants qui pour beaucoup sont traduits, plus ou moins bien d’ailleurs et souvent moins bien que bien. Presque tous sont des chants d’amour qui pourraient s’adapter à n’importe quel sujet : Dieu, Jésus, Mahomet, un conjoint, une maîtresse, un amant, un petit copain ! Le manque de sérieux et  de rigueur  de certains traducteurs va jusque-là, trop contents qu’ils sont, de voir leur nom accolé à un « tube évangélique » !
Je crois que notre destinée est d’être des adorateurs en esprit et en vérité, c’est-à-dire d’abord sur le plan spirituel et avec des conséquences dans la vie pratique de tous les jours. Est-il besoin de préciser qu’un véritable adorateur en esprit, ne fait pas de dette  ou encore qu’il ne trompe pas son conjoint ? Cela c’est le : « en vérité » !  Je ne me reconnais plus du tout dans ces directeurs de louange tellement pénétrés de leur importance, qu’ils ne sont soi-disant plus qu’en « communion avec Dieu », sans jamais un seul regard pour l’auditoire.
Sans doute que le processus engagé est irréversible et un article comme celui-là n’y changera pas grand-chose. Mais au moins, peut-être pourrions-nous éviter de rentrer dans une forme de starification malsaine concernant certains « artistes » et refuser de leur donner l’Eglise comme moyen de se fabriquer leur petite gloriole personnelle !
Ce serait la moindre des choses, n’est-ce pas ?
Samuel Foucart


La louange ne doit pas être un «job» comme un autre, et de toute évidence, il ne suffit pas d’avoir une belle voix, et encore moins un physique agréable, pour être un bon «leader de louange». Bien sûr que certains groupes animent des temps de louange de manière désinvolte sans en percevoir la moindre dimension spirituelle, confondant adoration et prestation… Nul besoin d’être prophète pour le constater, un simple regard affuté ne s’y laisse méprendre. Oui, c’est choquant et dérangeant, mais comme dirait l’Ecclésiaste, «il n’y a rien de nouveau sous le soleil». Certains croyants n’ont pas attendu le 21ème siècle pour honorer Dieu uniquement du bout des lèvres… Chacun rendra des comptes pour sa part. Quant à cette quête du «CD à tout prix», l’influence staracadémienne n’est pas loin et nous invite effectivement à être prudents quant aux influences mondaines qui tentent de pénétrer l’Eglise.
Ceci étant, attention de ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain ! Après avoir traversé de nombreux courants évangéliques dont les cultes m’ont paru bien mortifères, je me réjouis de voir éclore une nouvelle génération d’églises au sein desquelles la célébration se veut festive et qui considère la qualité comme une valeur chrétienne ! Je crois en un Dieu qui aime prodiguer la vie, la joie et la liberté, et cela passe notamment – mais pas uniquement – par une nouvelle conception de la louange. A croire certains, plus les cultes sont vieillots et ennuyeux, plus ils sont spirituels ! Très peu pour moi ! De grâce, ne nous accrochons pas à nos vieilles habitudes et à nos vieux recueils, mais soyons renouvelés dans notre intelligence et laissons jaillir un chant nouveau. En outre, il est erroné de croire que les églises accordant de l’importance à la musique, ne permettent pas aux gens de prier ou de vivre une louange personnelle…  Et je préfère une église dont les chants sont répétés dix fois, plutôt qu’une église dont les chants sont répétés un siècle de fois !
Accueillons avec joie cette nouvelle génération qui bouscule nos traditions, qui professionnalise la musique chrétienne et qui n’hésite pas à employer tous les nouveaux outils de la communication afin de changer l’image ringarde de nos églises. Notre rôle n’est pas de chercher à plaire à ce monde qui nous entoure, mais si le message de l’Evangile est immuable, notre mode de communication se doit d’évoluer et d’être en phase avec ce monde, pour pouvoir l’impacter avec efficacité. Accueillons cette nouvelle génération et plutôt que de la critiquer, aidons-là à ne pas se perdre ou à sombrer dans les dérives de la starification et du business. Un business, somme toute, très relatif, car ayant rencontré la plupart des artistes chrétiens de la francophonie, il est un peu dérisoire de le concevoir comme florissant. Quant à ceux qui veulent simplement exister au travers d’un CD, très souvent, ils comprennent rapidement leur erreur, après en avoir vendu seulement quelques centaines… La rentabilité n’est pas au rendez-vous !
Plutôt que de critiquer ceux qui se risquent à revendiquer un talent et à se battre pour le faire éclore, je préfère critiquer toutes ces églises qui sont des cimetières de talents. Combien d’églises ne manifestent aucune véritable vision ? Combien d’églises ne permettent pas à certains talents de se manifester ? Combien d’églises manifestent un esprit de misérabilisme et de ringardise ? Combien d’églises permettent réellement à chacun de vivre pleinement sa vocation et son ministère ? En réalité, si de nombreux jeunes quittent la France pour s’envoler vers le Canada, ce n’est pas l’Eldorado qu’ils cherchent, mais une autre mentalité et une autre vision où ils seront compris, encadrés, encouragés et propulsés dans leur ministère ! Oui, l’Eglise de France doit changer de mentalité. Une mentalité où le mot «leader» ne fait pas peur, car nous manquons cruellement de véritables leaders. Si nous voulons que ces jeunes se mettent au service de l’église locale, il faut d’abord que l’église locale se mette à leur service. L’Eglise récolte ce qu’elle sème. Si elle ne sème pas ce qu’il faut aux talents pour germer, elle ne récoltera aucun fruit et les jeunes iront, avec raison, trouver un meilleur terreau.
Paul Ohlott
Et vous ? Quel est votre avis ?